Arnaud s’élança à sa poursuite et la retrouva dans la fausse chambre une main sur la clé de vie et l’autre sur l’œil semi-ouvert, représentant la déesse Bastet. Arnaud considéra la scène un moment et la solution s’imposa à son esprit. Il s’approcha et posa sa main sur celle de sa femme, celle qui recouvrait l’ânkh. La porte s’ouvrit. Comment ? bégaya Olivia. Amour, joie, courage, patience et sagesse, sourit Arnaud, les cinq caractéristiques de la déesse Bastet. Il faut tout cela pour entrer dans la pièce. Et toi, mon amour, tu n’as aucune patience. Quant à la sagesse... Mais Olivia n’entendit pas la fin de la phrase, elle avait déjà disparu dans la pièce secrète. Sage oui, mais autant qu’un enfant à qui on aurait retiré son jouet préféré, murmura-t-il en regardant l’ouverture béante. Un peu plus tard, Olivia entendit une voix l’appeler comme dans un rêve. Elle la balaya d’un geste. Mais la voix insistait. Pire, elle semblait de plus en plus forte à mesure que le temps passait. A présent, elle faisait même vibrer les dessins. Comme c’était dérangeant. Elle semblait venir de la porte, alors Olivia passa la tête dans l’ouverture et se sentit tirée vers l’avant. L’instant d’après, Arnaud la serrait dans ses bras. Tu ne m’entendais pas ? s’énerva-t-il quand elle se fut dégagée. Ça fait des heures que je t’appelle. Tu es restée quatre jours. Quatre jours. J’ai cru que j’allais devenir fou. Laisse-moi te regarder. De grosses cernes commençaient à se dessiner sur le visage de la jeune femme et sa langue lui sembla bientôt aussi rêche que du papier de verre. Pourtant, elle ne s’était jamais sentie aussi vivante. J’ai trouvé, dit-elle avec un sourire lumineux. Puis, elle s’évanouit. Regarde, dit-elle à Arnaud, après avoir pris quelques heures de sommeil et dévoré un délicieux plat de lentilles. Elle avait reproduit des symboles et dessiné ce qui ressemblait à une carte. Le trait bleu, c’est le Nil, expliqua Olivia. Là, les pyramides, la vallée des rois, Deir el-médineh, là le temple d’Hatchepsout et là le Temple d’Abou Simbel. Tu vois? Olivia regardait Arnaud avec les yeux brillants. Il y avait vraisemblablement quelque chose à lire sur le papier. Olivia prit un crayon et commença à suivre un chemin compliqué qui partait de la grande pyramide et reliait quelques-uns des sites les plus connus de l’Égypte ancienne. Peu à peu la forme d’une clé de vie commença à prendre forme sous ses yeux. Khéops tient la clé de vie, expliqua Olivia. C’est le pharaon qui fit construire la pyramide la plus célèbre du monde en l’honneur du dieu soleil, Amon-Ré, considéré par les égyptiens comme le dieu suprême, le Grand Architecte. Tu te rappelles ce que dit la légende ? Arnaud leva les yeux au ciel. La légende dit que Khéops, aimé des dieux et désormais égal d’un dieu, a été admis à leur table pour lire le Plan de ses propres yeux, le Plan soit la raison de notre présence sur terre. Khéops, compléta Olivia, soutenu par la déesse Bastet et le dieu Thot, demande aux dieux d’accorder à ses descendants et à certains élus la grâce d’accéder aussi à ce suprême honneur. On dissimule une pièce secrète dans la colossale pyramide. C’est le point de départ. - Le point de départ de quoi ? - De la quête, s’exclama Olivia. De la quête pour l’immortalité. Bastet, protectrice de Pharaon, déesse de la joie et de la vie, qui guide les pharaons dans leur quête de l’éternel, montre le chemin. Olivia désigna le temple d’Abou Simbel, situé à la frontière de l’Égypte avec le Soudan. Le visage d’Arnaud s’éclaira. Il avait compris. La clé de vie, dit-il, la clé de vie s’étend jusqu’à Abou Simbel, qui symbolise le cheminement d’un autre pharaon, Ramsès II, pour accéder au divin, quelques 1300 ans après que les pyramides ont été construites. Sa quête qui finalise son état de dieu, et non de fils de dieu. Le cœur, dit Olivia en tapant sur un point situé en bordure de la vallée des rois, c’est Deir el-Médineh, le village des artisans, ceux qui avaient la charge de construire les tombeaux des pharaons et de leurs proches. Et voilà ce que j’ai découvert : ce sont eux les élus de la déesse ! Eux qui ont été choisis pour recevoir la vie éternelle. Eux qui ont été embarqués sur les bateaux pour aller vivre avec elle dans un royaume où la vie n’a pas fin. L’un des bras de la clé de vie désigne le Nil, le fleuve qui donne la vie et la reprend. C’est là, s’exclama Olivia en pointant du doigt un point imaginaire au bout milieu du désert, au bout de l’autre bras que se trouve le royaume de Bastet et que l’on découvrira le secret de la vie éternelle.
Arnaud regarda le dessin et sut que Olivia avait raison. Il ressentait au plus profond de son être l’appel de ce lieu mythique. Leur hôtesse apparut soudain à la porte de la terrasse, accompagnée du chat angora aux yeux d’émeraude. Bas me dit que vous partez demain ? dit-elle avec un demi-sourire. Bas vint se pelotonner contre Arnaud et ronronna sous ses caresses. En effet, répondit l’égyptologue, nous allons continuer nos recherches depuis Louxor. Nous ne vous remercierons jamais assez de votre hospitalité. La dame aux chats regarda Arnaud quelques instants puis vint remettre une petite boite à Olivia en disant : J’espère que vous trouverez ce que vous cherchez. Dans la boite se trouvait une clé de vie de couleur émeraude dans laquelle l’artiste avait représenté un œil semi-ouvert. Olivia contempla le merveilleux pendentif pendant quelques secondes puis leva les yeux vers la vieille femme pour la remercier, mais elle était déjà redescendue. Le lendemain, le couple prit le chemin de la Vallée des rois. Ils s’arrêtèrent à Deir El-médineh, visitèrent les anciens temples et les anciennes habitations des peintres, maçons, tailleurs de pierre et architectes qui créaient ici la gloire des pharaons ; l’espace d’un instant, ils crurent voir dans le vent du désert le cortège des artisans qui quittaient le village mythique pour accompagner la déesse Bastet dans son voyage éternel. Mais il n’y avait que des ruines et ce n’était que du sable. Arnaud, regarde, dit Olivia subitement. Sur le fronton du temple principal, juste au-dessus d’une représentation d’Horus sous sa forme animale, un ânkh et un œil semi-ouvert étaient étroitement associés. Horus, le dieu faucon, survolait une île. Une île au milieu du désert. C’est là que nous allons.
A suivre...
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